Extrait de la Lettre conseils des notaires nº 62 - novembre 2022
Me contenter de désigner "mes héritiers" bénéficiaires de mon contrat d’assurance-vie
➜ ne permet pas d’identifier ses bénéficiaires de manière certaine
Les héritiers seront déterminés au décès de l’assuré, avec le risque qu’ils ne correspondent plus à sa volonté s’il a désigné entre-temps, dans un testament, un légataire universel ou à titre universel qui n’est pas le seul héritier. En effet, l’assuré a pu souhaiter écarter des enfants du bénéfice du contrat au profit du légataire. Or, ceux-ci viendront concurrencer ce dernier dans la répartition du montant de l’assurance-vie. Certes, la jurisprudence maintient une incertitude quant à la manière de prendre en considération le legs universel, mais le critère de recherche de la volonté de l’assuré qu’elle privilégie nécessite que les parties intéressées aillent en justice. Mieux vaut, par conséquent, que le souscripteur désigne nominativement le légataire auprès de l’assureur s’il souhaite en faire le seul bénéficiaire du contrat.
Les héritiers peuvent aussi renoncer à la succession de l’assuré. L’article L.132-8 du Code des assurances a prévu qu’ils conservent leurs droits sur le contrat d’assurance-vie. Bien souvent, les héritiers ayant renoncé à la succession hésitent pourtant à accepter à ce titre le bénéfice de l’assurance-vie, par crainte de remise en cause de leurs droits par les créanciers de la succession.
➜ conditionne le règlement de l’assurance-vie à celui de la succession
L’assurance-vie ne fait pas partie de la succession, et son règlement à la connaissance du décès de l’assuré intervient indépendamment et à brève échéance, ainsi que l’y oblige la réglementation. Dès lors que la clause bénéficiaire désigne "les héritiers de l’assuré", le sort du contrat d’assurance devient lié au règlement de la succession, puisqu’il faudra attendre l’établissement par le notaire d’un acte de notoriété ou d’une attestation dévolutive pour connaître les bénéficiaires. Les difficultés à régler une succession peuvent alors différer, voire empêcher, la remise de la prestation par l’assureur : dévolution contestée en justice, recherches généalogiques abouties ou non, absence d’ouverture de la succession. En désignant nommément au contrat des bénéficiaires par leur état-civil complet et l’indication du lien de parenté, l’assuré facilitera au contraire le règlement par l’assureur.
➜ revêt une utilité en tant que clause subsidiaire
Il est nécessaire de mentionner au contrat un ou plusieurs bénéficiaires de substitution, désignés avec les mêmes précisions et précautions, afin de prévenir tout risque d'absence de bénéficiaire en cas de renonciation ou de décès des bénéficiaires précédemment désignés. La mention "à défaut les héritiers de l’assuré" à la fin de la clause bénéficiaire évite ainsi la réintégration à l’actif successoral de l’assurance-vie avec la fiscalité des droits de succession. Cette "clause balai" permettra aux héritiers de percevoir le capital-décès du contrat, selon leur vocation successorale, en bénéficiant de la fiscalité dérogatoire de l’assurance-vie.